Lorsqu’il plongea la première fois le nez dans les cheveux bouclés de Daisy Slowburn, Angus Connal Gray y trouva un parfum suffisamment envoûtant pour ne plus le quitter. Il abandonna sa carrière prospère de bourreau des cœurs pour en entamer une nouvelle, et surtout plus sérieuse, au sein du Ministère de la Magie. Tandis que Daisy emplissait sa boutique tant de bougies magiques que de clients ravis, il intégra après une formation intense la brigade de réparation des accidents de sorcellerie.

De leur union naquit le 06 Avril 1983 un petit bout de sorcière dont les pleurs tout d’abord puis les rires ensuite, résonnèrent dans le petit appartement qui couronnait le magasin de Daisy. Le temps passa sans rien estomper de leur bonheur familial, jusqu’à ce qu’une aventure d’un soir détruise en 1989 une harmonie longue de six ans. Rhiannon était alors haute comme trois pommes et portait déjà longue la chevelure auburn qu’elle tenait de son père ; toute enfant qu’elle était, elle s’imprégna lors de l’ultime dispute de ses parents de toute la détresse et la rage qui déchiraient leur mariage, et sa propre tristesse ressurgit en un premier jet de magie. L’immense malle de voyage qui attendait Angus à la porte d’entrée prit subitement feu, dans une tentative inconsciente de retenir maladroitement son père auprès d’elles deux. Mais rien n’y fit. Un Aguamenti bien senti tarit les flammes et un adieu en fit autant des larmes de Daisy, puis Angus disparut dans un dernier claquement de porte vers les bras aguicheurs d’une diseuse de bonne aventure.

Et la vie continua, pourtant. Laborieuse, teintée de colère noire et d’abattement, mais elle perdura vaille que vaille. Dans le petit appartement du premier étage brûlaient en permanence des bougies façonnées par Daisy ; celles qui diffusaient autour d’elle les parfums emmêlés de valériane et Puffapod égayaient les journées de tristesse grise, tandis que les chandelles aux baies broyées de Pipaillon aiguillonnaient l’ardeur de Daisy à se battre, pour elle et Rhiannon.

Tandis que sa mère s’évertuait à choyer son commerce, la petite fille déployait pendant son temps libre toute la curiosité qui l’animait déjà, en explorant les moindres recoins du grenier attenant à l’appartement. Un jour qu’elle s’y était aventurée, l’année de ses dix ans, elle trouva tapies dans les couches de poussières d’un coffre ancien les mémoires des Slowburn. Cet après-midi là, les heures s’écoulèrent aussi vite pour Rhiannon qu’une poignée de sable fin ; elle s’absorba dans la lecture de ses archives avec une passion qu’elle n’avait encore jamais ressentie auparavant, butant parfois sur des mots que son jeune âge trouvaient encore complexes, ou que le temps avaient rendu désuets. Elle découvrit, couchée noir sur blanc, la tragédie qui avait frappé le clan originel dont elle était la descendante au cœur du Moyen-Âge, et en conçut aussitôt une passion dévorante pour l’histoire de la magie. Avec les années viendraient s’y adjoindre une tendresse toute particulière pour l’histoire de l’art magique, dont les portraits et les paysages chatoyants illustraient à grands coups de pinceau les récits historiques qu’elle dévorait.

Sa convocation à Poudlard puis le début de sa scolarité dans la célèbre institution magique la confortèrent dans une passion qui dépassait de beaucoup l’entendement de ses camarades. Rhiannon ne comprit jamais pourquoi, à son image, les autres élèves n’étaient pas capables de surpasser l’ennui lourdement distillé par le professeur Binns pour s’absorber dans les trésors de cette matière ; s’il fallait y voir un point positif, elle ne fut jamais aussi tranquille que dans les rayons de la bibliothèque spécialement dédiés aux points les plus méconnus de l’histoire de la magie. A cet intérêt bouillonnant s’entremêla bientôt un amour sans bornes pour la légende du Graal ; une petite obsession que Rhiannon s’amusait à dire voulue par le destin en raison de son nom, Holly Gray, jusqu’à ce que sa mère lui révèle le métier de l’amante qui avait enlevé son père et fasse naître en sa fille un ressentiment profond pour toutes les sciences nébuleuses de la divination.

Durant la seconde guerre des sorciers, qui opposa les forces noires de Voldemort aux partisans du bien, Rhiannon resta fidèle aux valeurs que sa mère lui avait inculquées depuis toute petite. Bien que seulement âgée de quinze ans lors de la guerre, elle en comprit rapidement la dangerosité et les enjeux terribles qui se jouaient ; loyale au camp du Bien, elle ne prit pourtant pas part à l'ultime bataille de Poudlard qui vit chuter Voldemort et Harry Potter. Daisy, trop effrayée du traitement que pourraient infliger à une jeune élève sang-mêlée les nouveaux dirigeants de l'école, préféra durant cette période obscure retirer Rhiannon de Poudlard et la garder chez elle.

Chez la jeune fille, la guerre ancra en elle la conviction que les êtres humains, Moldus ou sorciers, au Moyen-Âge ou à présent, pouvaient être capables du pire. Constante dans son amour de l'histoire, et consciente de l'importance de l'époque qu'elle avait vécue, elle récolta durant tout la guerre les différents témoignages et articles qui deviendraient, avec le temps, de réelles preuves historiques en sa possession.